La genèse :
Paradisland a été tourné dans des conditions très particulières. En effet, pendant la période de la Covid-19, entre les restrictions de déplacement, les couvre-feux ainsi que les limites de rassemblement, faire un court métrage dans ces conditions fût un réel défi.
Je me souviens de comment est né ce projet. J’étais seul dans mon 9m² d’étudiant, nostalgique des jours où nous pouvions nous déplacer librement quand un ami me dit “Martial, y’a le concours de création étudiante, si tu te fais chier essaye de participer !”. Nous étions alors en mars 2022, le sujet, annoncé en septembre, était 2050. Sans rien attendre de particulier, et n’ayant jamais réalisé ou écrit aucun court métrage, je me suis mis lentement à l’écriture. En l’espace de deux soirs j’avais déjà de nombreuses pistes, un court métrage contemplatif dans l’esprit de Knight Of Cups (réalisé par Terrence Malick) commençait à voir le jour. 1 mois plus tard nous étions 50 sur un plateau de tournage avec des autorisations de préfectures, des personnes toutes plus talentueuses les unes que les autres dont je ne connaissais pas plus de la moitié. Nous tournions alors la séquence de la fête des riches.
Le défi des distances :
Paradisland a nécessité d’être tourné dans des lieux très divers. Nous avons eu besoin de nous rendre au plateau du Larzac, ainsi qu’au phare du cap Béar. Tous ces déplacements ne pouvaient être faits dans les règles imposées par le gouvernement. Nous avons donc tenté notre chance et parcouru cette distance bravant la limitation de 10 km ainsi que le couvre feu, non sans peur de jeter ce projet à l’eau.
A l’époque, les restrictions étaient très récentes et nombreuses étaient les sanctions pour ceux qui se faisaient prendre. La distance de 10km passe encore, mais je vous laisse imaginer quand sur le trajet, nous avons dépassé 20 heures en traversant Narbonne, puis Perpignan, à trois dans une voiture avec une épée d’amendes au-dessus de la tête. Heureusement, nous en sommes sortis indemnes.
La fête des riches :
La fête des riches, comme nous l’appelons, fût certainement le meilleur souvenir pour toute l’équipe. Nous devions, autour d’une piscine, recréer un simili décor de jardin bourgeois prêt à accueillir une fête. Après 4 jours de construction de décors faits avec 3 bouts de ficelle, nous avons réussi à transformer le lieu, au départ très austère, en un étrange décor de fête aux dérives quasi-sectaires.
Une fois le décor fait, une équipe de 40 personnes s’est alors retrouvée sur le terrain pour donner vie au plateau. Musiques, victuailles, maquillages étranges, costumes loufoques. Tout y était. Malheureusement c’était sans compter le soleil, qui après une matinée de tranquillité pendant laquelle nos figurants se faisaient maquiller et coiffer, a laissé place à une chaleur écrasante provoquant de multiples insolations, qui heureusement sont restées sans suite.
Après la première méca du plan, un cri a résonné sur le plateau “ON VA LE GAGNER”. Nous étions persuadés que ce plan nous permettrait de décrocher la victoire.
La fête des pauvres :
Dans la même dynamique que la fête des riches, nous avons dû recréer en 3 jours un bidonville. Entre les cours à la Fac de Toulouse et les décors à construire 40 km plus loin, nous nous relayions, quitte à rater certains cours pour nous assurer une meilleure préparation.
3 jours plus tard, même scénario : le bidonville se remplit, le feu s’allume, silence plateau, moteur .. et ACTION !
Problème ! Nous avions mal prévu nos lights… Une seule pauvre 60b pour éclairer la scène. Des néons de couleurs par-ci par-là, un feu pour éclairer quelques sans abris, mais rien de très suffisant. Malheureusement, cette nuit de tournage, bien que réussie, fût teintée d’un goût amer de déception dû au manque de temps de préparation.
Une post production chaotique :
Le plus compliqué dans ce projet fût certainement la post-production. Malheureusement la seule semaine où nous pouvions monter le projet se trouvait sur une semaine de tournage : l’examen de fin d’année de notre troisième année de licence. Nous devions être à 100% sur ce tournage. Un tournage de 4 jours nous mobilisant le jour et la nuit. Pour couronner le tout, ce tournage était en pleine session de partiels, avec 2 ou 3 partiels à rendre.
Nous nous levions à 7h, tournions jusqu’à 13h. Mangions en faisant nos partiels jusqu’à 14h, tournions jusqu’à 18h, mangions et faisions nos partiels jusqu’à 20h. Pour le tournage de nuit, nous avions essayé de mixer les équipes pour alterner entre tournage et montage et ceci pendant 3 jours.
Au 4ème jour, nous avions terminé le montage sur les coups de 16h mais résidait un dernier problème : l’envoyer. Nous étions perdus au milieu des montagnes à quelques battements d’ailes de la frontière espagnole sans réseau français. Ni une ni deux, nous sommes montés dans une voiture et avons roulé jusqu’à avoir du réseau en espérant que la connexion soit suffisante pour envoyer ce projet avant l’heure limite de 17h. A 16h50 le projet était enfin envoyé. Ouf !
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